J’ai entendu François Bayrou…

Je connais bien François Bayrou et j’ai même pour lui une certaine estime, mais je n’ai pas compris son nouveau chemin en 2007 et rompu avec lui en participant à la fondation du Nouveau Centre.

Dans ses différentes émissions, il évite, comme la peste, de répondre à la question essentielle : que ferez-vous si vous n’êtes pas au second tour ?

Il prétexte qu’il ne faut pas jouer le second tour avant le premier : certes !

Mais Jean Luc Mélenchon n’hésite pas, lui, à affirmer clairement qu’il appellera à voter François Hollande s’il n’était pas au second tour. Cette affirmation, maintes fois répétée, ne l’empêche pas de monter dans les sondages et même de dépasser François Bayrou.

Il y a pourtant plus de différences entre Jean Luc Mélenchon et François Hollande qu’entre le Modem et le Nouveau centre. Ils auront du mal à gouverner ensemble, à se mettre d’accord sur l’Europe, sur la fiscalité, sur le nucléaire, sur la sécurité, sur les retraites, sur l’emploi et les rémunérations alors que nos propositions et celles de François Bayrou relèvent de la mise au point plus que d’une rude négociation.

Parce que cela conforte sa stratégie, il fait mine d’oublier que toutes les grandes démocraties se distinguent par deux blocs majoritaires qui alternent au gouvernement. C’est vrai de la Grande-Bretagne, de l’Allemagne,de l’Italie, de l’Espagne ou des Etats-Unis. Le monde est devenu trop complexe et les problèmes à résoudre trop imprévisibles pour que le citoyen puisse choisir entre trop d’options : il vote pour une ligne générale, la stature et le comportement d’un homme, plus que pour les subtilités de programmes trop souvent corporatistes.

Si j’approuve la proportionnelle permettant une représentation plus juste des sensibilités politiques, je suis contre une proportionnelle intégrale. Je crains toujours ce que nous avons connu aux élections régionales où, avec quelques sièges, des partis marginaux faisaient, ou non, une majorité pour faire voter un budget : souvenirs amers de la IV République ! La dose de proportionnelle ne doit pas permettre que des minorités prennent en otage la majorité et bloquent toute réforme en un temps où nous en avons le plus grand besoin !

Si François Bayrou, à l’instar de Jean Luc Mélenchon, annonçait, dès maintenant, pour qui il appellerait à voter au second tour, dans l’hypothèse où il n’y serait pas, les choses deviendraient plus claires. Il est différent, personne n’en doute, mais il n’accepte pas pour autant les inepties que propose une gauche qui réunit Mélenchon et Joly, Valls et Hamon, Montebourg et Baylet !

Son refus, au nom d’une idyllique « union nationale », accentue artificiellement les oppositions, les critiques qui rendent difficiles les reports de voix, offrant ainsi à la gauche un boulevard au second tour et beaucoup de désillusions pour les cinq ans qui viennent.

En entendant François Bayrou, je me sentais partagé entre le regret qu’un homme politique de cette qualité s’égare sur des chemins d’impossible et l’espoir qu’il puisse nous rejoindre pour renforcer une majorité présidentielle où le Centre aurait enfin toute sa place.

3 réflexions sur « J’ai entendu François Bayrou… »

  1. Cher Olivier,
    Je suis impatient de prendre connaissance du portrait que tu feras de Nicolas SARKOZY. Quelles explications nous fourniras-tu sur le désenchantement qu’il a provoqué chez tous ces électeurs qui en 2007 ont voté pour François BAYROU au 1er tour et N. SARKOZY au second pour ne pas voter ROYAL.
    Pourquoi ont-ils été déçus par son action durant les 5 années passées au point de créer un tel désamour que, quoi qu’il arrive, ils ne voteront plus ni pour lui ni pour un autre (sauf peut-être pour BAYROU) et ainsi grossir les rangs des abstentionnistes.
    Quelles explications nous fourniras-tu pour que l’on comprenne le cheminement de Hervé MORIN qui s’est présenté aux présidentielles contre SARKOZY, pour enfin le rejoindre, et créer ainsi un sentiment de défiance à l’encontre du Nouveau Centre.
    J’entends ici ou là que N. SARKOZY est dominé par l’émotionnel. Cela explique le « Fouquet’s » (une idée de Cécilia qu’il voulait retrouver), le yacht de Bolloré sur lequel il se serait réfugié pour soigner ses états d’âme, ses multiples voltes faces, comme ses excès de langage ou ses déclarations tonitruantes de matamore etc. etc..
    Ces Français qu’il a déçu ont perdu confiance en lui parce-qu’il n’a pas souvent, voire jamais, pris les bonnes décisions au bon moment.
    Pourquoi ? manque de confiance, manque de bon sens, manque de courage, mal conseillé ?
    En tous cas pas par manque de travail, car nous savons qu’il est un gros travailleur.
    Les Français souhaitent avoir à leur tête un Guide, qui fixe des caps et les tienne, tout comme un Capitaine de navire trace sa route sur la carte avant de quitter le port et ne la modifie qu’en cas de grave évènement.
    Il n’a pas laissé cette image à tous ces Français qui ont voté pour lui au second tour de 2007 et qu’il a déçu.
    Non je n’ai pas envie de voter pour lui, ni au 1er ni au second tour. Je ne voterai pas non plus pour F. HOLLANDE, mais je suis impatient de savoir si tes arguments me feront changer d’avis.
    Par contre, je te considère comme un excellent Député et voterai pour toi aux prochaines législatives à moins que tu aies d’autres projets.
    Reçois mes très sincères et cordiales salutations
    Daniel GODRET

    • Cher Daniel,
      Monsieur Dumainil,
      Bonjour,

      Je tiens d’abord à vous remercier d’avoir pris le temps de ce dialogue que je souhaite par dessus tout. J’ai demandé que votre réponse figure, comme mon propre texte et la présente réponse, en première page du blog, afin de bien montrer que l’essence-même de mes articles est de susciter les débats.

      Dès la semaine prochaine je publierai une série d’articles sur mes votes durant ces 5 années et je vous dirai mes fiertés, mes hésitations ou mes refus. Je pense y démontrer que nous avons eu raison de créer le Nouveau Centre et de soutenir un plan de réformes peu égalé sous la Vème République.

      Mais je veux d’abord tenter de répondre à vos questions.

      La plus importante : pourquoi vais-je voter Sarkozy avec conviction et sans état d’âme ?

      La vie, comme la politique, oblige à choisir, c’est-à-dire à renoncer !

      Ne pas choisir est également un choix dont les conséquences sont parfois lourdes : les efforts d’aujourd’hui auraient été moindres, si accomplis plus tôt !

      Mon choix d’hier

      – Qui peut penser que notre situation nationale et internationale aurait été meilleure si Ségolène Royal avait été élue à la place de Sarkozy ?

      – Qui peut penser que François Bayrou aurait pu faire face à la crise avec une majorité d’anti-Sarkozy et d’anti-Royal ?

      – Je suis heureux d’avoir fait le choix qui a permis à la France de s’en sortir moins mal que les autres et de pouvoir encore espérer une meilleure sortie de la crise.

      Mon choix pour demain

      – Qui peut penser que notre situation nationale, européenne et internationale peut s’améliorer avec François Hollande à la tête de l’Etat bridé par Mélenchon dans la rue et par Joly à l’Assemblée ?

      – Qui peut penser que François Bayrou, qui n’a pu ni su fédérer les Centres, arrive par magie à créer une Union Nationale avec la gauche et la droite dont il n’a cessé de brocarder les programmes ?

      – Qui peut penser que l’abstention soit la solution, alors qu’en pleine crise, elle laisse « aux autres » le soin de décider du destin de la France ? Sur un tel sujet, l’abstention est pour moi un abandon de poste au combat.

      – Je suis certain de faire le bon choix d’avenir en votant pour Nicolas Sarkozy qui a fait la preuve de sa capacité de travail, de sa détermination, de son courage, de sa compétence et, plus récemment, de sa prise en compte des exigences comportementales dues à sa fonction.

      Nous connaissons tous la légende de l’âne de Buridan qui est mort faute d’avoir su choisir s’il avait plus faim que soif ou l’inverse, délaissant dans ce dilemme et le seau d’eau et le sac d’avoine…

      C’est Charles Péguy qui disait « le Kantisme à les mains pures, mais il n’a pas de mains ». Sur cette Terre si humaine bornons-nous à choisir le plus apte, pas le plus parfait !

      Dans des articles à venir je vous dirai combien mon choix n’est pas une simple élimination. J’ai appris à connaître Nicolas Sarkozy, j’ai, comme vous, pesté contre ses emportements, ses écarts de langage, ces limites dépassées dans des secteurs sensibles où le cœur aurait dû l’emporter sur la dithyrambe, mais je l’ai aussi sincèrement admiré pour son courage en Géorgie, en Côte d’Ivoire ou en Libye lorsque les cocardes bleu blanc rouge de nos Rafales ont fait pleurer de joie les mamans de Benghazi. J’ai été fier de sa résistance à la rue dans la réforme du droit de grève, dans les transports terrestres, dans la réforme de l’Université, dans la réforme des retraites alors que François Bayrou avait facilement renoncé à la réforme de l’école privée en 1993. J’ai salué sa capacité de négociation pour créer le G20, pour sauver l’Europe et l’Euro avec Madame Merckel.

      Je reviendrai sur tous ces sujets car son bilan est un peu le mien et, lorsque je compare la France à la plupart de ses voisins, je me rappelle la formule connue « lorsque je me regarde je me désole, si je me compare je me console ! »

      Avec tous mes remerciements

      Sincèrement vôtre,

      Olivier JARDE

  2. Et pourtant !!

    Pourquoi voulez-vous absolument que François Bayrou se rallie au panache, plus tout à fait blanc, de Nicolas Sarkozy avant le premier tour des présidentielles. Je constate d’ailleurs que l’autre courant centriste qui s’apprêtait à présenter son candidat, en la personne de Jean Louis Borlot, ne s’est déclaré en faveur de Sarkozy que très récemment. Le parti radical avait jusque là émis des réserves, tout à fait justifiées à mon goût, quand à l’empressement de N. Sarkozy et de l’UMP en général a reprendre à son compte les positions nauséabondes du FN sur l’émigration, la viande halal et autres sornettes extrémistes dont le sinistre Guéant (pardon ministre) était chargé de mettre à l’honneur. Bref je remercie François Bayrou d’avoir su jusqu’ici garder ses distances avec de telles positions qui n’entrent pas dans mon système de valeurs républicaines.
    Rassurez vous toutefois et c’est là que se situe le paradoxe, la montée en puissance de Jean Luc Mélanchon et son ralliement affiché au 2 ème tour pour François Hollande c’est pain béni pour celui que vous soutenez. Pour ma part, je pense en effet que la gauchisation du discours d’Hollande sera d’autant plus forte que le résulat de Mélanchon sera élevé. Et dans ce cas les lunes socialistes feront bon poids dans la balance face aux haines d’extrême droite. Il restera alors à Nicolas Sarkozy un boulevard pour recentrer son discours entre les 2 tours et rallier une très grande parties des électeurs de François Bayrou.
    Ne soyez donc pas impatient et souhaitez que le candidat du MODEM fasse un très beau score!!

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